Alors que je marchais dans le froid de la nuit
Et que je profitais de ce calme profond,
Au cœur de mon silence a retenti un bruit
Qui d’un seul coup a attiré mon attention.

Tournant alors la tête au ciel j’ai remarqué
Que la nuit devant moi, éclairée de mille feux
De multiples bijoux soudain s’était parée ;
Qu’un ballet de lumière scintillait à mes yeux.

Émeraudes, saphirs, améthystes, diamants
Qui illuminiez les cieux de vos couleurs,
Fontaines d’or fondu, rubis étincelants,
Votre beauté n’était que chimique splendeur !

Mais derrière ces paillettes brillantes mais éphémères
– Car les feux d’artifices ne vivent qu’un court instant –
Ceinte, auréolée, de diffuse lumière :
Fumée semblant de nacre, halo iridescent,

Se laissait voir la lune, la pleine lune d’été,
De la voûte céleste seul véritable joyau,
Seule beauté naturelle de ce ciel éclairé,
De la nuit lumineuse immuable flambeau.

Les vacances arrivent à grands pas
Je les attends pour retrouver
Ma petite soeur adorée…
Les vacances, bientôt, seront là.

Les vacances bientôt seront là
Ma petite soeur adorée!
Et, petit ange, je suis pressée,
D’enfin te serrer dans mes bras.

D’enfin te serrer dans mes bras,
Mon petit ange, je suis pressée,
Car d’être de toi séparée
Crée un vide douloureux en moi.

Hélas, petite fille, je doute
De revoir ta bouille toute chouchoute
Et d’avec toi me consoler :
Survivrai-je à cette fin d’année?

Un oiseau, aujourd’hui, est venu me saluer,
A regardé chez moi d’un oeil fort étonné,
A toqué à ma vitre avec son bec tout noir,
Tandis que dans ma chambre il s’efforçait de voir…

De son oeil rond, si rond, il m’a fixé longtemps
Effrayé, je ne sais, curieux, certainement
De savoir quelle matière bizarre et inconnue
L’empêchait de passer sans arrêter sa vue.

Et cette pie si blanche, si noire, un peu fouineuse,
Avec dans son regard une étincelle curieuse
Pendant plusieurs minutes encor m’a regardée
De son oeil rond, si rond, et puis s’est envolée.

Je fais n’importe quoi, je ne me comprends plus,
Et dans ma tête tout est flou, vague et confus
Je ne sais pas quoi faire, indécise et perdue ;
Mes sentiments et mes pensées sont ambiguës…

Anna Sorès est une sorcière
J’en suis certaine, elle a un don
Et avec sa magie grossière,
Elle change mes paupières en plomb :
Cette professeur soporifique
D’un seul mot peut faire sommeiller
Toute une classe, c’est dramatique
Car alors, comment l’écouter?

Jusque dans mon foyer, l’humanité m’oppresse ;
Des gens me parlent, qui m’aiment, et croient le témoigner
En me traquant toujours – pour me désennuyer –
Et, me persécutant, augmentent ma détresse.

Moi, je veux être seule ! Je sors dans mon jardin
Et le plus loin possible, l’homme grégaire, je fuis.
Je plonge avec bonheur dans le calme de la nuit
Puis, avec ravissement, aspire l’air cristallin.

Le voile de la nuit recouvre peu à peu
Mon jardin, ma nature, mes arbres, ma campagne
Et cette obscurité du silence s’accompagne
Qui amenant le calme assouvit tous me voeux.

Délicieuses ténèbres ! Poignante obscurité !
Votre douce quiétude me bouleverse entière.
Et lorsque m’enveloppe la nuit hospitalière,
Je me sens pleine d’une bienheureuse sérénité.

La peine m’a envahie… Aujourd’hui, tout est noir.
Seul le fait de pleurer, pleurer sans m’arrêter
A un peu allégé mon profond désespoir.
J’aimerais arrêter de penser, oublier…

Mais ma blessure est trop profonde et trop sanglante
Pour être soulagée par de simples sanglots ;
Nuit et jour dans ma tête, des souvenirs me hantent
Qui ne pourront jamais être dit par des mots.

Je hais les gens, et plus encore, je hais la foule:
Je hais cette entité grouillante, stridente, suante;
Tous les jours, elle m’entraîne, m’enferme dans sa houle
Et quand j’y suis plongée, me remplit d’épouvante.

Tous ces gens me bousculent, me frôlent, me compressent,
Me heurtent, souvent même me lorgnent perversement
– Je m’estime trop heureuse lorsqu’ils ne me caressent –
Et tous leurs hurlements me brisent les tympans.

… Enfin seule! J’ai fui
Des foules de Paris
La chaleur et le bruit.

Le climat aujourd’hui est fort bien assorti
À mon humeur morose, à mon âme meurtrie.
Il n’y a plus de soleil, il n’y a plus de couleurs
Et c’est l’obscurité qui règne dans mon coeur.

Le vent soulève une atmosphère nauséabonde,
Apportant des nuages qui sur ma tête grondent;
De lourdes gouttes tombent des cieux en courroux
Et se mêlent aux larmes qui coulent sur mes joues.