Elles s’étaient éveillées à la nouvelle lune
Le cœur brûlant et fier, l’esprit frais et serein,
Et, leur frêle chemise délacée sur leurs seins,
Par les rues d’Iziaslav, fantômes dans la brume,
Elles marchèrent à pas vif loin des parfums urbains.
Dans la nuit lumineuse par l’absence de l’astre
Sous un ciel semblant un lac de diamants,
Elles devinèrent enfin l’infini ascendant
Qui liait à leurs pieds du géant au majastre
Et elles se prosternèrent devant le firmament.
Les rameaux odorants des profondes pinèdes
S’élançaient chaque nuit en fougueux destriers,
Ou, transmuant leurs jambes en nageoire d’acier,
Elles découvraient les rites des pesants cirripèdes
Et couraient les courants qui coulent des glaciers.
Le feu leur était serf, l’eau leur était soumise ;
Le roc et l’air des vierges follement amoureux
Frôlaient leurs formes rondes aux grottes et aux cieux
Et les hommes et les femmes devant ces fleurs exquises
S’étouffaient de dépit – coupables envieux !
Un matin, dans la tendre fraîcheur de l’automne,
On enchaîna leurs mains, on fit luire le bûcher,
Les Huit montèrent les marches, souriantes, enchantées,
Et lorsque la fumée voila la foule atone,
Elles saisirent leurs pieux et les firent voler.