Author: Soune

Il en est qui sont faites pour exalter la vie ;
Si un sourire éclos sur leurs lèvres au repos
Comme un soupir grandit en un terrible écho
Leur être s’en trouve embelli.

Il en est qui n’ont pas grandi pour le bonheur,
La joie les enlaidit, le chagrin leur sied mieux
La détresse et les larmes font briller leurs yeux ;
Moi, je suis belle en pleurs.

Cesse donc de brailler, inutile pédant !
Nos copies fragmentaires t’ont enflammé l’esprit
Et ta voix abîmée, et tes ricanements,
Nous serinent encore ta monotone scie.

La remise en question n’effleurera jamais
La surface lustrée de ton paisible ego ;
Tu balaies notre perte de ton air guilleret
Et nous renvoie serin vers un fatal fiasco.

Les ténèbres levées,
Que j’aime à regarder
Le bronze mordoré
Du faisan dans les prés !

Quand la brume s’envole
S’esquivent les furoles :
L’astre et son aréole
Éclairent les corolles ;

L’air est limpide et doux,
Des rayons acajou
Éclairent par à-coups
L’asphalte sous mes roues.

Quand du fond de mes rêves, je ne pleurerai plus,
Quand ma face cessera d’être un masque livide
Couvrant d’un simulacre de sourire perclus
L’amertume sans fond qui m’a toute abattue,
Qui a fait de mon corps une loque languide,

Quand ma gorge calmera ses envies de hurler
Tout le fiel qui l’emplit, mes désirs implacables,
Quand mes mains détendues souhaiteront caresser
Plutôt que déchirer, plutôt que lacérer,
L’ensemble venimeux de mes tristes semblables,

Quand je ne verrai plus avec tant d’aversion
M’entourer les brûlants méandres de la foule,
Quand je serai guérie de cette obsession
Qui me pousse à m’enfuir des agglomérations
Et me fait me terrer, de hargne quasi saoule,

Quand je pourrai croiser le regard des humains
Sans vouloir aussitôt leur opposer ma porte,
Quand j’aurai étouffé tous ces sombres instincts
Qui hantent mon esprit, destructeurs tant que vains,
C’est que j’aurai guéri ou que je serai morte.

Jolie fleurette aimée
Alors s’en vient l’ombre
C’est l’heure de t’éveiller
Injuste destinée !

Nous sommes séparées
Tout mon cœur se fait sombre
De ne pas retrouver
Ma sœur à ses côtés.

J’attends toute agitée
L’instant où, sans encombre,
Heureuse et consolée
Je viendrai te chercher.

Je parle et mes propos s’envolent, vides de sens,
Poussés vers un esprit qu’ils ne toucheront pas :
Le feu de son regard perd de sa cohérence ;
Je n’attends plus le jour où il me comprendra.

Il dit que nos esprits sont par trop différents
Mais je comprends chacune de ses simples paroles
Si je prononce un mot, il attend un instant
Puis reprend sa pensée sans perdre la boussole.

Il entend seulement même lorsqu’il se tait
Mes phrases sont toujours bêtes ou contradictoires
Il ne fait pas d’effort, il n’écoute jamais,
Et toujours incomprise, je ressasse du noir.

Été 2007

Il est minuit passé et la voûte céleste
Illuminée d’étoiles resplendit et flamboie ;
Les astres étincelants en lumineux amas
Remplissent l’univers, éternels, et attestent
La vanité de l’homme devant l’immensité
Et des cieux nocturnes l’éternelle beauté.

Les lames en rafales
Gémissent sous le vent
– Mouvement envoûtant
Harmonie atonale –

La voie lactée s’épanche devant mon regard,
L’obscurité pâlit face à son pur éclat ;
Si l’on tourne les yeux, à peine, on aperçoit
Le firmament – peu s’en faut – redevenir noir
Orné des rares étoiles scellant la galaxie
Qui brillent, solitaires, dans l’espace infini.

Une nuée d’embruns
Déferle sur mon corps
Et je respire encore
Le doux suroît salin.

De temps à autre, un roc plonge dans l’atmosphère,
Crée à ce contact un cortège de feu,
Embrase le ciel clair de son sillon laiteux :
L’espace est tout strié de lueurs passagères
Qu’engendrent les bolides. Leur fugace splendeur
Rehausse des soleils l’immuable grandeur.

Les feux de l’empyrée
Se reflètent à la houle
Des ondes qui s’enroulent,
Constamment animées.

Lentement les étoiles s’estompent : l’aurore naît.
Quelques points lumineux subsistent à l’occident
Reliques de la nuit, éphémères diamants,
Dans l’aube qui s’éveille derniers bijoux discrets
Parant un horizon orangé et azur
Où les nuages roses semblent autant d’éraflures.

Le monde, autour, est flou,
Mon estomac m’appelle,
Le clavier est doux
Sous mes doigts soudain mous.

Oh mes yeux rebelles
Voudraient bien se fermer
Sur la route, le gel
A fait passer ses ailes.

Le bitume est glacé
Et l’eau de la terrasse
À su me faire glisser
Et je suis fatiguée.

Mon genou sur la glace
À cogné rudement !
Mon estomac bavasse
Et son caquet m’agace.

Le lourd marmonnement
Du professeur obscur
Rend mes yeux pesants
Je m’endors à présent.

J’ai vu passer l’année dans la nuit glaciale,
Le vent frôlait la neige qui venait de tomber
Où se réverbérait le brasier des étoiles :
Des astres en fusion pâle miroir gelé.

J’ai entendu Éole hurlant et sanglotant
Sa substance écorchée aux crêtes de la roche
Et ai pu deviner une nymphe cherchant
À regagner le ru, sous la glace, si proche !

Et je tremblais de froid à regarder la lune
Tandis que le soleil t’éclairait à nouveau,
Que sa chaleur plongeait dans ta crinière brune,
Tandis que ses rayons se lovaient sur ta peau.

La fraîcheur de la nuit a brûlé mes poumons,
Ton matin était lourd d’arômes et de lumière
Je t’avais rarement – ah, cruelle émotion –
Sentie si loin de moi qu’en cette nuit d’hiver !

J’ai marché dans le vent, sur la terre craquelée
En murmurant ton nom, en appelant sans cesse,
Ma voix toujours faiblie par tant de sécheresse
Mais rien n’a répondu que la bise enragée
Et mes pas égarés s’emplirent de détresse.

J’ai caressé longtemps les rugueuses ramures
D’étiques cerisiers qui paraissaient éteints
En cherchant dans l’écorce où promenait ma main
Une trace de toi, changée par un augure
Mais je n’ai rien senti et grandit mon chagrin.

J’ai respiré avec espoir les cieux brûlants,
Espérant te rejoindre en suivant ton odeur,
Mais l’espace n’était plein que de l’âcre chaleur
De la poussière des rocs et du sable volant
Qui continuellement engloutissaient mon cœur.

Alors je suis tombée au bord de la rivière
Et mes larmes ont brouillé le reflet à fleur d’eau;
Mais quand, mes pleurs flétris, j’ai pu voir à nouveau
Tu étais au miroir et souriais, altière,
Mignon ange gardien de mon âme l’écho.